La dictature des émoticônes
- Marie Davy
- 12 févr. 2019
- 2 min de lecture
A chaque époque ses règles de grammaire et de bienséance. En 2019, plus possible d’écrire un message amical sans smiley, même au boulot ! Lors d’un stage auprès de chercheurs en sciences humaines, il m’est arrivé d’aller droit au but. Je voulais transmettre une information ou poser une question, et j’utilisais le minimum de mots. Le cadre était professionnel alors je restais sobre dans mes mails. Mais voilà, les autres pensaient que j’étais froide ! Ou que je donnais des ordres ! Il n’avait pas ce problème là, Molière, quand il écrivait ses pièces ! Aujourd’hui, les expressions qu’on a dans la vraie vie s’inscrivent dans nos écrits. La ponctuation ne suffit plus. On a besoin d’émoticônes ! Parfois, il m’arrive donc d’en mettre à chaque fin de phrase, quitte à remplacer les points, par peur de représailles !
Dernièrement, j’envoyais rapidement un message à mes amies, via une application de messagerie instantanée, et ces dernières ont pensé que je leur «parlais mal» car je ne décorais pas mon message, contrairement à d'habitude. J’avais omis les smileys pour aller plus vite et tout de suite, on pensait que je boudais.
Bien sûr, ces remarques ne sont pas applicables à toutes les conversations, mais il est vrai que j’ai remarqué cette tendance à devoir embellir, assouplir nos propos écrits à l’aide de ces caractères imagés. Comme si le texte ne suffisait plus, ou qu’on avait toujours besoin de se représenter l’autre physiquement. Quand on lit le message de quelqu’un, si on le connaît assez bien, on entendra sa voix, on verra moins souvent son visage.
Ces émoticônes subsisteraient-ils au visage et aux expressions de chacun ? Pourtant, inutile de rappeler leur fonction uniforme. Sept milliards d’humains pour sept émoticônes. Sont-ils véritablement représentatifs ? Du moins, il semblerait qu'ils catégorisent les émotions "universelles". En espérant que ce ne soit pas les émoticônes qui inspirent peu à peu nos expressions dans la vraie vie...

Ce besoin de voir l’autre pendant la conversation expliquerait en partie l’essor des FaceTime pour remplacer les appels téléphoniques de base. Ou bien pourquoi on aime tant communiquer via Snap Chat, même lorsque notre photo n’apporte rien au message. Est-ce par simple envie d’utiliser la technologie ? Dans le sens où nous possédons les moyens techniques pour le faire alors pourquoi s’en priver ? Ou bien s’agit-il d’un véritable manque à combler ? Dans le sens où l’homme a besoin de communiquer, plus la communication utilise ses sens : plus elle fait sens ? Ainsi, l’homme privilégierait toujours la conversation la plus proche du réel. Dans ce cas, à quand l’application qui permet le toucher ? A méditer.
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